Christine, 46 ans Cancer des ovaires

C’est nue comme un ver et les pieds coincés dans les étriers du fauteuil de l’échographiste que j’ai compris que j’avais un cancer.

J’étais venue sur le conseil de mon ostéopathe qui avait senti quelque chose de suspect en palpant mon ventre pétri d’endométriose et au transit un peu ralenti. Il n’était donc pas question de cancer, du moins selon moi.

La première radiologue « voyait quelque chose » sur le pelvis mais sans comprendre de quoi il pouvait bien s’agir. Ceux parmi vous qui ont visionné le film « alien » comprendront que j’aurais pu me croire sur le tournage d’un film d’horreur, lorsque, un deuxième praticien fourrageant avec frénésie dans mon vagin, muni d’un …. et le sourcil froncé, m’a annoncé  «une masse d’origine indéterminée» et a pris un rendez vous pour moi en urgence pour subir une IRM.

Il y a comme ça des mots clés qui font mouche: IRM, masse, et des attitudes qui ne trompent pas. D’habitude, quand je fais une échographie, c’est plutôt sympa, rigolo de voir l’intérieur de son bidou, et le gynéco explique que non, le gros truc tout noir, là, c’est pas une tumeur, juste ma vessie, et on plaisante, on discute légèrement, oui je pars en vacances, et vous? Tout ça tout ça…
Là c’est pas rigolo du tout, et le soin qu’ont les médecins de  remplacer le mot « tumeur » par «masse», pour ne pas me faire peur, ne me dit rien qui vaille!
« Masse », c’était en sciences physiques au collège, ou pour peser des choses ! Ca n’a pas de place dans mon ventre une masse; dans mon ventre il n’y a que des choses connues normalement…
J’allais donc devoir attendre une semaine de plus, pour l’IRM, plus encore une semaine, pour voir celui qui allait être mon chirurgien,  attendre l’opération,  les résultats de l’anatomopathologiste, une quinzaine de jours après l’opération, et enfin le rendez vous avec l’oncologue pour savoir à quelle sauce j’allais être mangée.
Le mot « patient » n’est pas usurpé, quand on est soigné pour cancer!

J’ai pleuré la première fois, en sortant de cette échographie. Finalement j’aimais mieux l’endométriose, pas terrible non plus, mais qui au moins ne risque pas de faire mourir!
Ensuite j’ai tout accepté en essayant de connaître  le plus de choses possible grâce à mon grand copain internet, puis en posant des centaines de questions aux formidables médecins qui me suivront par la suite, et qui ont toujours montré de l’enthousiasme à me répondre.

À ma grande surprise, à la confirmation de la maladie, je ne me suis pas évanouie, je n’ai pas pleuré, j’ai eu peur mais finalement pas tant que ça.  Il est encore trop tôt pour savoir ce que me réserve l’avenir, mais le sentiment que cette maladie pouvait  être le début de quelque chose et non la fin de ma vie ne m’a encore jamais quittée.
Tout d’abord, j’allais enfin pouvoir me reposer. Travailler à 400 kilomètres de chez soi, à la longue , c’est lassant et épuisant! J’allais pouvoir explorer cet univers médical qui m’a toujours intéressée, et puis, plus tard, j’ai rencontré IMAGYN, des femmes extraordinaires qui ont souvent plus d’ « ancienneté » que moi avec la maladie, et c’est réconfortant de parler entre «gens qui savent». En rire deviendra mon arme. Je ne me sens ni courageuse, ni une battante, ni toutes ces choses que ceux qui ne savent pas trop comment réagir disent pour nous réconforter. Les amis ne sont pas partis, il y en a même d’autres qui sont apparus, ma famille la plus proche a été fantastique, et c’est grâce à eux que j’ai pu être accompagnée lors des moments les plus délicats: chirurgies, examens de contrôles, etc…

Cela fait un peu plus d’un an que j’ai été diagnostiquée, pour l’instant en rémission, et j’oserais presque dire que « grâce » au cancer, ma vie prend enfin le chemin que je souhaitais, de là à dire que j’ai provoqué ma maladie, c’est un autre débat…